Aujourd’hui j’ai lu cela sur Facebook sur son fil d’actualité, beaucoup de chose sont dite, mais peut-être pas tout !
C’est d’en bas que nous nous adressons à vous. Faut-il que nous chantions ou que nous crions pour que nous, artistes, chanteurs, comédiens, écrivains, musiciens, danseurs, peintres, plasticiens, circassiens, spectacle « vivant », restaurateurs, viticulteurs, tous ces humains qui nourrissent le cœur, le corps et l’esprit, et tous ceux qui travaillent avec nous, nous accompagnent, nous soutiennent, pour que nous tous, humains de la rue et du cœur, soyons entendus ? D’en bas. Là où vous nous laissez, sans vous soucier de savoir ce que nous devenons, sans rien proposer si ce n’est d’attendre, si ce n’est de détruire ce qui nous fait vivre et d’exclure de ce monde que vous dites diriger ce qui de tout temps toujours et partout a permis de s’exprimer et de vivre. A permis de construire, de rêver, de survivre. De vivre, c’est cela, c’est ce que je hurle en cri choral : nous voulons vivre ! Ce que vous nous renvoyez, c’est un non. Un non définitif. Nous sommes devenus par votre faute et votre seule responsabilité, les enfants du non, les non essentiels. Des mendiants. Hier vous nous acclamiez, aujourd’hui vous nous conspuez en faisant semblant de nous laisser vivre. En agitant au-dessus de nos têtes la promesse du virtuel. Rideau sur la vie. Le théâtre, c’est vous qui le faites et les seuls comédiens qui demeurent, c’est encore vous. Nous, nous crevons, lentement mais sûrement, et avec nous, la grâce et l’émotion. Vous insultez chaque vers, chaque entrechat, chaque note de musique. Vous avez l’air désolé et vous nous dites d’avoir du courage, vous qui n’avez pas celui d’attaquer de front toutes ces industries qui nous pillent depuis tant d’années. Gloire à l’argent, Ave Internet. Vous dites chercher des solutions, en gardant les rideaux tirés, les portes fermées. Et vous voulez nous parquer et parquer ceux qui nous aiment comme on le fait de moutons galeux juste avant l’abattoir. « Dans les abattoirs, on est dans la déconstruction », disait Joseph Ponthus. C’est ce que vous faites. Vous déconstruisez, la fausse larme à l’œil, ce que tant de générations et tant de siècles ont construit. Vous nous jetez des miettes de solution en pis-aller et ne nous offrez que le droit de crever, créant votre Cour des miracles, est-ce votre but ? Est-ce ce que vous souhaitez laisser, une Cour des miracles et nous, en restes d’infortune, transformés par vos bons soins en souvenirs et en hologrammes, âmes errantes sur une toile sans vie ?
Nous ne voulons plus de larmes, et pour cela, s’il faut prendre les armes, nous le ferons. Nos armes, ce sont nos mains, nos pieds, nos cœurs, notre sang, nos chants, nos rêves, nos créations, nos envies et parfois nos folies. Qui ont fait tourner le monde et qui pourraient continuer à le faire tourner si vous descendiez de vos chaires dorées par notre travail, si vous vous intéressiez au cours de la vie plus qu’à celui des bourses de France et du monde.
Molière l’adoré, Molière le protégé du Roi, disait : « C’est nous inspirer presque un désir de pécher, que montrer tant de soins de nous en empêcher. » Vous avez réussi à nous l’inspirer, ce désir du péché, vous qui nous obligez à donner nos œuvres comme l’on forcerait un boulanger à jeter son pain par les fenêtres après une nuit de dur labeur. Et les sacoches remplies de cynisme, vous n’hésitez pas à frapper les artistes déjà à terre.
Nous, les artistes, les saltimbanques, les amoureux du spectacle vivant, ne voulons pas de cette métamorphose que vous inventez en faisant croire que l’avenir est dans votre néant gavé de gigas et de bitcoins. Nous ne serons pas les cloportes de ce monde kafkaïen que vous faites naître et prospérer, dansant autour et l’idolâtrant comme un soir de sabbat. Nous, nous vous demandons la reconnaissance que nous méritons, la place qui nous revient. Nous réclamons ces lieux de vie que vous avez enterrés, nous exigeons qu’il nous soit rendu le droit de travailler et de vivre. Nous espérons que le vivant du spectacle ne soit pas détruit par votre euthanasie financière – et ne dites pas que c’est sanitaire, c’est mentir. Nous ne sommes pas un danger. Nous ne sommes pas une menace. Nous ne sommes pas un virus. Nous sommes vivants et voulons le rester. Mais ce que vous promettez, c’est de tuer le vivant pour laisser à ceux qui nous succéderont un monde remplis de moutons électriques, prêts à bêler à chaque fois que vous allumerez vos écrans. Priver la population de l’art et du spectacle vivant, c’est porter atteinte à son humanité.
Nos enfants, leurs enfants, méritent mieux. Autant que le chant des oiseaux, autant que le vol d’un papillon, ils méritent que vous ouvriez à nouveau les grilles de la vie, de nos vies, et que vous rendiez à l’art ce qu’il est en son essentiel, la Vie. Et l’art est ce qui reste, la dernière empreinte qui nous reste, la dernière fenêtre ouverte sur le rêve. La seule évasion, le seul voyage encore possibles à l’heure où les frontières sont fermées, à l’heure où la liberté de circuler est un souvenir. L’Art, c’est cette immense fenêtre dont vous avez clos les volets.
Alors vous, qu’on appelle « puissants » et qui de là-haut voulez faire croire que vous vous inquiétez de nous, que vous pensez à nous, ceux d’en-bas, descendez et rejoignez-nous. Ne nous laissez pas crever. Ne nous laissez pas disparaître. Ne soyez pas ceux qui auront tuer l’art et la vie. Considérez-nous. Aidez-nous, comme nous avons toujours aidé à ce que le monde soit monde. Venez avec nous rendre à ce monde ce dont il a besoin : des cœurs qui battent et battent à l’unisson
Signataires :
©Cali (artiste pluridisciplinaire et écrivain)
©Anne-Laure Buffet (thérapeute et écrivaine)
©Éric Poindron (éditeur, écrivain et poète)
©Richard Unglik (artiste playmobilesque)
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